En 1987, Sega fait un carton dans les salles d'arcade avec Shinobi, première aventure de son célèbre ninja Joe Musashi. Ce jeu d'action emprunte beaucoup des mécaniques de Rolling Thunder de Namco sorti un an plus tôt, et adapte l'univers pour surfer sur la thématique ninja en vogue à l'époque. Fort de ce succès, Sega décide de poursuivre la license, et en 1989, la Mega Drive, fraîchement débarquée aux USA et arrivée un an plus tôt au Japon, accueille l'excellent The Revenge Of Shinobi.
Ce second opus reprend quelques années après les événements du premier épisode. L'organisation criminelle Zeed, éliminée, renaît de ses cendres sous la forme de Neo Zeed, tue le maître de Joe Musashi et capture sa fiancée Naoko. Partant à sa recherche, Joe Musashi commence ainsi son aventure au Japon, dans la province d'Ibaraki, avant de s'envoler quelques niveaux plus loin pour les Etats-Unis, et finalement terminer sa quête sur la base marine de Neo Zeed, où est retenue Naoko.
On retrouve donc le célèbre ninja toujours armé de ses shurikens mais désormais vétu de blanc et de rouge. Plusieurs changements notables différencient le gameplay de The Revenge Of Shinobi et celui de l'original sur arcade. Premièrement, il n'est plus question ici de sauver des otages pour terminer les niveaux. Le jeu s'étend sur 8 niveaux, qui suivent un même motif, les 2 premiers segments où Joe Musashi doit progresser vers la sortie en se débarrassant des ennemis, et le dernier segment où il doit affronter le boss du niveau. Ensuite, le ninja de Sega dispose désormais d'une barre de vie, ce qui est très appréciable. En contrepartie, ses shurikens sont maintenant en quantité limitée.
Joe Musashi se voit doté d'un nouveau mouvement clé, le double saut, qui lui permet d'atteindre de plus grandes hauteurs, et qui lui permet aussi de passer du premier plan vers l'arrière plan dans les niveaux qui disposent de cette spécificité. Combiné au bouton d'action, ce double saut permet à Joe Musashi de lancer 8 shurikens en arc de cercle sous lui, ce qui a pour effet de nettoyer la partie de l'écran à laquelle il fait face de toute menace immédiate. Le double saut requiert néanmoins un certain timing pour être effectué correctement, et il conviendra de bien le maîtriser tant cette technique est utile dans le jeu.
Pour se sortir de situations périlleuses, Joe Musashi peut avoir recours ponctuellement à de la magie, 4 jinstu sont désormais à la disposition du ninja, un jintsu pour amplifier ses sauts (Fushin), un jintsu pour invoquer un dragon de feu (Kariu), un jintsu pour se suicider en explosant et endommager tout ce qui se trouve à l'écran (Mijin), et enfin le jintsu le plus utile, pour s'entourer d'une armure électrique capable d'absorber 4 coups avant de disparaître (Ikazuchi). Dans les niveaux, de nombreuses caisses en bois contiennent divers items à ramasser, vie supplémentaire, power-up, jintsu, shurikens. Le gameplay, tout en conservant les mêmes bases et en restant orienté action, se démarque assez nettement de celui de son aîné, et se révèle au final plus agréable (car moins intraitable) et plus varié.
The Revenge Of Shinobi était à sa sortie une véritable vitrine technologique de la Mega Drive encore jeune sur un marché dominé par la NES. Même si d'autres jeux Mega Drive ont fait mieux depuis, la réalisation reste aujourd'hui encore très honorable, grands sprites, superbes musiques de Yuzo Koshiro (que l'on retrouvera avec tout autant de talent sur la série des Streets Of Rage), et surtout un charme indéniable qui s'en dégage tout du long, grâce à une ambiance excellente, des environnements et situations constamment renouvellés, et des boss fights mémorables.
The Revenge Of Shinobi a aussi beaucoup impressionné à l'époque par sa difficulté. En effet, le jeu est loin d'être facile, tant il laisse peu de place à l'approximation. De nombreux passages du jeu requièrent de la mémorisation et de l'anticipation afin d'être passés correctement. Cependant, si The Revenge Of Shinobi requiert un certain investissement pour espérer en voir la fin, il est loin d'être aussi difficile que sa réputation le laisse à penser, et ce pour plusieurs raisons: le joueur est récompensé d'une vie supplémentaire tous les 100 000 points, de nombreux bonus sont disséminés dans le décor sous forme de caisses invisibles qui se dévoilent sous les coups de Joe Musashi, et enfin, le jeu dispose d'un mode "easy", en tous points identique au mode normal si ce n'est que l'on commence avec 10 vies par continue au lieu de 3, et qui se révèle idéal pour s'entraîner sur les passages difficiles.
Il est amusant de constater que The Revenge Of Shinobi a connu plusieurs révisions, pour violation de copyrights assez flagrante. Ainsi dans la version originale, on sera amené à affronter sous des apparences plus ou moins reconnaissables Rambo, Hulk, Terminator, Spiderman, Batman et Godzilla, rien de moins… Les différentes révisions qui se succéderont supprimeront malheureusement quasiment toutes ces références.
Sega attendra quelques années pour sortir une suite directe, Shinobi 3: Return Of The Ninja Master en 1993, avec un gameplay survitaminé bien plus rapide, un panel de mouvements étendus assez génial, une difficulté atténuée, et des graphismes sublimes. Après ces épisodes 16 bits, la série Shinobi continuera sur d'autres plate-formes, la Saturn, la Playstation 2 et la GameBoy Advance, mais c'est une autre histoire, et pas aussi glorieuse…
Aujourd'hui, The Revenge Of Shinobi n'a rien perdu de sa superbe, et est souvent considéré comme le meilleur opus de la série chez ceux qui ont fait l'effort d'en venir à bout. Un des jeux de ninja les plus aboutis qui va jusqu'à en exiger les qualités du rôle: précision, persévérance et patience. Ne tardez plus, votre fiancée compte sur vous et vous attend… Neo Zeed aussi…