Super Metroid (Metroid 3)

Par Gugus, 29 février, 2012

Mon premier contact avec la série Metroid s'est opéré justement en 2002. Et là , je sens des connaisseurs qui relèvent la tête, ils savent de quoi je parle.
Un ami avait ramené sa Game Boy Advance et Metroid Fusion, je suis donc rentré dans cet univers avec l'opus le plus scénarisé (et dirigiste certains diront) paru à  ce moment dans la série.
Et puis arriva Metroid Prime. En un mot : baffe. En commençant le jeu, il m'est apparu que les récits faisaient référence à des anciens titres en cherchant dans ma mémoire, je me suis souvenu que mon oncle m'avait initié à  quelques titres sur sa Super Nintendo, avant de me trouver un truc pour les lancer sur son iMac G3. Au final, j'avais fini Zelda A Link to the Past grâce à  ça. Je pensais avoir tout vu.
Et puis j'y suis retourné. Et j'y ai retrouvé une ROM «Metroid». Super Metroid.
«C'est un vieux machin, on va bien voir ce que ça donne». Jeune insouciant que j'étais.

Le menu démarre avec une ambiance à  suspense, oppressante. Juste quelques mots sur fond noir sont affichés : 1994, et Metroid 3, suivis par des plans panoramiques et serrés (avec les moyens de l'époque) sur des corps de scientifiques, pour enfin dévoiler le menu et son Metroid captif au centre.
Tout de suite le ton est donné : cet épisode fera part belle à  la mise en scène et aux détails. Et c'est vérifié juste après avoir lancé le jeu, car une introduction faisant office de rapide résumé et de mise en situation apparait, avec une voix de narrateur (anglaise), grande première pour un jeu Metroid.

N'importe quel joueur se retrouvera donc accroché. Le premier niveau, véritable écho à  un «Aliens» et sa découverte d'un station vidée de ses habitants et jonchée de corps (à  l'échelle d'une salle, faut pas trop pousser non plus), achèvera la mise en place de l'ambiance. Puis avec un compte à  rebours obligeant à  fuir, classique de la série, le Metroid volé se volatilisera sous nos yeux, emporté par Ridley. Samus prendra donc la direction de la planète Zebes, l'environnement du premier épisode.

«Ouais, tu vas encore nous dire que Samus peut se rouler en boules et lancer des rayons. Moi je me casse». Hey. Stop. Rasseyez-vous et écoutez un peu : oui, Samus peut se rouler en boule pour passer dans des tunnels, utiliser tout ça dans des énigmes ce qui est un peu la marque de fabrique de la série quand même !
MAIS. Super Metroid mélange tous l'équipement des deux premiers épisodes. En en rajoutant, en plus. Ici, le costume de gravité fera sa première apparition (pour ne plus être gêné dans ses mouvements par les liquides), de même que les bombes de puissance, les super Missiles, l'accélération (lié à  la touche de sprint), le grappin (qui remplacera la boule araignée de Metroid 2), et la visée au rayons X.

Et là , ça te calme, hein ?

Surtout que tout ça n'est pas rajouté sur la cartouche pour faire genre. Tout sert et utilise un level design impeccable. Les déplacements sont complexifiés par les nouveaux types de portes, les passages secrets sont plus nombreux et vicieux, les manipulations demandées au joueur sont sans cesse nouvelles, et le pire c'est que tout ça est souvent  inaccessible au début, mais visible (les yeux plus affutés, eux, verrons la richesse des passages secrets de cet épisode). 
Fini les grands couloirs vides, place aux passages plein de malice. Et le génie du travail accompli est là , le joueur progresse dans ces grandes cartes sans avoir besoin d'indicateur d'objectif. Je ne parle pas de chemin balisé car l'exploration n'est jamais facile, mais l'emplacement des améliorations et la construction des niveaux fait que le jeu se parcourt de bout en bout tout en fournissant un effort conséquent et gratifiant, sans être trop ardu pour frustrer même des petites natures d'aujourd'hui (affirmation de vieux joueur grincheux).
On avance de salle en salle tout en ayant toujours l'envie d'en voir plus, et les objets progressent de manière intelligente avec l'environnement, un vrai bonheur !

Concernant la maniabilité de notre Chasseuse de Primes, le tout se fait assez naturellement, même si l'inertie ajoutée aux déplacements (surtout aux sauts) et la visée en diagonale demandera un petit peu d'habitude (mais pas grand chose).
Chose unique pour ce jeu, le menu de pause, en plus de la carte, nous indiquera les équipements de la belle et nous permettra d'activer ou de désactiver chacun des équipements ! Une fausse bonne idée peut-être, car tout au long du jeu, c'est surtout désactiver le High-Jump le temps d'une salle qui sera utile, pouvoir mixer les rayon étant intéressant mais pas obligatoire (ce qui aurait été une bonne idée de créer des ennemis le demandant soit dit en passant).
En plus de cela, il existe dans le menu principal de la partie la possibilité de changer la configuration des touches, et Samus se plie donc à  nos envies dans un labyrinthe de Zebes toujours plus grand, ce qui n'est pas un mal.

 

Ajoutez-y un univers plus riche, et Super Metroid devient une petite perle pour les fans : par exemple le début de l'exploration de la planète Zebes se fera en sens inverse de sa dernière sortie, datant de Metroid 1. Le joueur descend dans le puits de fuite qui lie Tourian à  Crateria, jusqu'à  retrouver l'ascenseur de début de partie de Metroid 1, et l'emplacement du premier item, la boule Morphing. Et là , je crie au génie (sans avoir le rayon de glace ho ho ho !)
Avec ce Metroid 3, Nintendo avait donc méchamment bétonné l’univers : des références aux anciens épisodes, tous les items emblématiques étaient présents, la narration plus étoffée au début, des reprises de la structure de Zebes du premier épisode, complexifié pour celui-ci, tout en offrant des Boss et des passages mémorables (petit exemple : la nouvelle zone d'une épave de vaisseau spatial bien mystérieuse)
Certes, rien de foufou par rapport à  l'univers d'un Final Fantasy. Mais dans son genre, Metroid s'est bien étoffé et Super Metroid le raconte très bien, jamais trop ou trop peu.

Visuellement, on en prend plein les mirettes. Alors Super Metroid n'est pas le jeu de la Super Nintendo qui va le plus utiliser les arrières-plan (à  une époque où le nombre de couches de sprites était une religion), contrairement à  des Contra III ou Donkey Kong Country, mais cela lui confère un cachet notable. C'est souvent très simple (surtout dans l'ancien Brinstar), mais aussi des fois subtilement progressif avec quelques éléments de décor en arrière-plan pour suggérer une grotte sans fond et oppressante. Et ça fonctionne plutôt bien !
Là  où le jeu s'amuse, c'est avec certaines échelles de taille : des Boss sont tellement grands que l'écran entier ne suffit pas à  l'afficher. Et pour tout suivre, c'est ardu !
Les différentes zones de Zebes sont assez variées, de la pierre, de la jungle, de la lave, mais aussi des intérieurs métalliques ou organiques autant intrigants qu'inquiétants. C'est un vrai plaisir de découvrir de nouvelles zones tout au long du jeu ! Super Metroid va de plus nous faire découvrir de part et d'autre des éléments plus mécaniques et mystiques appartenant à  la civilisation perdue des Chozos, qui vont lier toutes ces zones entre elle pour former un tout, en plus de renforcer la solidité de la mythologie Metroid. Parce que oui, c'est aussi le premier de la série à  mélanger les zones de la carte, fini le «un ascenseur = une nouvelle zone»
Ce qui va ensuite participer à  cette grande ambiance, et de loin, c'est aussi la bande son.
Au niveau des bruitages, Samus est bien seule contre le monde. Seul le son des pas de son armure vient briser les quelques bruitages naturels des ennemis ou de quelques éléments de décor. Super Metroid pose ici une base du joueur contre le vide, contre la peur de l'inconnu déjà  introduite avec les décors très sombres. 
Et bien sûr, la bande originale vient magnifiquement accompagner tout ce beau monde. Quand je dis «magnifiquement», ce n'est pas pour rien, car cette musique est considérée comme l'une des meilleurs de l'ère 16 bits. Toutes les capacités sonores de la console doivent être utilisées, de la plus basse (le thème principal du menu, assourdissant et inquiétant), à la plus aigue (la musique du vaisseau écrasé, qui joue avec nos nerfs, à  coup de tambours et de pauses, suivies de montées vers les aigus).
Les mélodies sont toutes aussi réussies, comme la zone inférieure de Brinstar, et son ton mélancolique et effrayant à  la fois, le thème de Norfair et ses cœurs sur rythme de percussions inébranlables, ou encore la fanfare de Samus Aran. Là  aussi, le sentiment de solitude propre à  Metroid est magnifié, et si bien qu'avec les jingles classiques des nouveaux objets et chargements de partie, Kenji Yamamoto signe une bande son simplement monstrueuse.

Super Metroid a donc prit toutes les bonnes idées du Metroid original et de sa suite méconnue sur GameBoy pour les transporter vers un tout autre niveau. Celui de la quasi-perfection du genre.
Jamais un Metroid n'avait été aussi bien raconté et construit, et la claque qu'il a pu mettre dans les dents des amateurs du genre à  sa sortie y est sûrement pour une grande part dans sa «légende».
Car à  une époque où la critique est facile envers la «repompe», Super Metroid serait aujourd'hui descendu en flammes. Mais c'est tellement bon, et à  mon avis une des meilleures productions 2D/aventure/tir/plateforme de tous les temps.
La preuve, Retro Studio, avec Metroid Prime que j'ai mentionné en début de cet article, s'inspire beaucoup de cet épisode. C'est dans les vieux pots qu'on fait la meilleure soupe, dira-t-on.


(j'ajouterais que même si Nintendo oublie les 25 ans de cette série pour privilégier Zelda, n'hésitez pas à  aller écouter le projet de remix et réorchestrations «Harmony of a Hunter», créé par des fans pour cet anniversaire, c'est un régal).
 

Année de sortie
1994
Plateforme
Éditeurs